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vendredi 22 janvier 2016

À LA MANIÈRE DE...

    Tout le monde écrit des romans policiers, ma concierge, mon poissonnier, mon facteur. Alors j'ai eu envie de m'offrir une petite fantaisie ; comme disent les enfants "Imagine que tu serais un auteur de polars..."
    Je vous laisse siroter ce pastiche (jeu de mots du jour).

    Pat Bomer respire lourdement. Malgré ses paupières lourdes il aperçoit le trottoir maculé. Il n'a pas plu depuis un mois : le goudron lisse est d'un rouge défraîchi. Pat distingue des taches et leur auréole brune, toute une décoration suspecte de pisse de chiens, de crachats et de ce qu'il a la flemme d'imaginer.
    Un morceau de glace finit de fondre -il lui semble reconnaître un chocolat fudge- et forme une sorte d'îlot sur le bitume. Une femme passe devant lui ; il ne relève pas la tête et ne voit qu'une cheville fine, un beau pied sanglé dans une chaussure de cuir vert, de hauts talons, des ongles peints.
    L'ébauche de quelques fantasmes vagues passe derrière ses yeux mais il a trop chaud pour les retenir et se contente de savourer une impression incertaine, légèrement appétissante.
    Le feuillage du catalpa qui le protège de son ombre est immobile.
    L'infime espace qui se maintenait entre ses paupières vient de se clore, sa nuque se plie. D'un coup il se redresse. Combien de temps s'est-il assoupi ? Interdit pendant une planque. Erreur professionnelle. Les boulots d'été vous ruinent la santé, mais il faut payer les traites de la maison.
    Il jette un oeil sur le trottoir. La petite île de glace a tout juste changé de forme : il n'a rien manqué.
    Un chien arrive d'une démarche balancée. Ignorant la présence de Pat sur son banc, il fait trois fois le tour du tronc, lève la patte et jette sur le bois un trait de pisse symbolique. Pat s'est toujours étonné de l'énergie dépensée par les clébards pour balancer leurs ridicules giclettes, ici ou là, cent fois par jour.
    Alors, pour tromper l'ennui, il commence à trier des arguments pour expliquer cette vaine débauche. Dans ce genre de boulot le difficile est de tuer le temps sans décrocher complètement.
    Bientôt son petit potage mental est prêt. (Les chiens pissent :
        par pur désoeuvrement,
        par incontinence congénitale,
        pour emmerder les hommes en souillant leurs arbres, leur murs et leurs lampadaires,
        pour se donner une contenance,
        pour le plaisir,
        par un besoin métaphysique d'affirmer leur existence...)
    Il n'a pas encore épuisé son troisième argument lorsque son client sort de l'immeuble, le teint comme la façade de briques, le visage rassasié : il a bien une maîtresse. L'enquête s'engage bien.

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