Je vois quelques bonnes raisons, tirées du fond de ma vieille besace.
La première c'est que la lecture est un des derniers actes de résistance contre la mise à disposition des cerveaux par tous les rois Ubu médiatiques. Pour tous ceux qui se sentent comme des fourmis devant ces puissances, il existe ces petits espaces de liberté, à condition de ne pas céder aux sirènes Amazonesques et leurs burgers books. Quand vous êtes dans un livre (de bon aloi) vous échappez aux radars de Bigdata et à ses tentacules manipulateurs.
Une deuxième raison de lire c'est que, dans le silence d'un lieu que vous avez choisi, vous pouvez attaquer une lecture difficile, par exemple Barthes, Foucault ou Jung. Comme moi, vous ne saisirez pas tout mais vous étirerez les limites de votre esprit -comme un gymnaste améliore ses extensions- et vous vous rendrez disponible à des textes qui vous auraient semblé inaccessibles.
Une dernière raison est la possibilité, à travers la lecture, de pénétrer les strates qui composent la personnalité d'un écrivain, de capter les souffles qui peuvent s'échapper par ses fissures intimes. Seuls les arts majeurs permettent cette expérience, si riche ; la littérature en est un, à condition que l'auteur ait acquis une certaine densité et ne dévoile ses fragilités que pudiquement, indirectement, sans complaisance ou noirceur exhibitionniste.
Alors, fréquentez votre libraire tant qu'il est encore un artisan de la transmission et non un manutentionnaire dans un hangar à bouquins.
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