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samedi 6 février 2016

MATTHIEU GALEY

    Je viens de finir le premier tome du journal de Matthieu Galey (1953-1973). Depuis le temps que j'en entendais parler et que je renâclais, parce que j'ai lu tant d'autobiographies vaniteuses et complaisantes qu'un préjugé tenace me dissuade de seulement regarder leur titre.
    Autant j'ai aimé celle d'Elias Canetti, autant j'ai peu apprécié celle de Charles Aznavour -mais j'aime ses chansons- où j'ai senti peu de chaleur.
    Donc, bien que frémissant de préventions je me suis laissé charmer par ce Journal ; Galey est fin, torturé juste ce qu'il faut, et souvent savoureux dans son analyse des écrivains de l'époque. En revanche j'ai lu en diagonale les passages concernant sa vie amoureuse, car, n'étant pas homosexuel j'ai du mal à me représenter le charme d'un beau bond ; je l'admets, je suis de parti pris. Mais pas hostile.
    Feuilleter cet éphéméride c'est se plonger dans cette époque et constater que la comédie humaine ne fait jamais relâche ; c'est aussi se régaler que de quelques formules croustillantes qui prouvent que ce critique littéraire aurait pu tenter la carrière d'écrivain, devenir une sorte de La Rochefoucauld ou, encore mieux, une résurrection du trop mésestimé Chamfort.
    Je me permettrais deux citations de son année 1969 qui traduisent deux pensées chères à mon esprit sur l'illusion de la gloire littéraire et la barbarie cacoscopique* de "l'aménagement" du territoire.

    Au Figaro, dans l'immense salon vide, interview d'André Billy, bon vieillard avec une mâchoire flambant neuve, des yeux qui croisent les bras, et une surdité totale. A quatre-vingt-cinq ans, il a écrit soixante volumes et reste sans illusions sur leur sort : "Pour la modestie, je ne crains personne."

    Dans le train, je "vois", comme les voyantes, ce qu'étaient jadis les villages, ce qu'ils vont devenir, et je souffre, presque physiquement. Incapable de jouir d'un beau paysage sans imaginer la bâtisse moderne qui le détruira bientôt. Sensation d'étouffement, de panique. Cette cohue invisible , je m'étonne d'être toujours seul à la voir. Il n'y faut pourtant pas beaucoup d'imagination. Superbe optimisme crétin de mes contemporains. Ou pis, pessimisme nonchalant ; laisser faire, avec un sourire désarmé, jusqu'à la catastrophe. 
    Et moi, du reste, qu'est-ce que je fais ?

   Pan, dans mon bec !

*Cacoscopie : encore un mot que je ne suis pas sûr d'avoir inventé. Mais je vais quand même lui consacrer un Mémo de mes mots.

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