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jeudi 30 avril 2015

NON-CONCLUSION



EN GUISE DE NON-CONCLUSION



               Ma vision peut paraître pessimiste, mais quand j’entends les journalistes, notamment les spécialistes de l’économie, je m’aperçois que je suis un amateur dans le catastrophisme. Voyons… quels sont les mots qui reviennent tout le temps dans leur bouche… ah, oui, inquiétant, inquiétudes, s’inquiéter. Vérifiez, vérifiez.
               Alors, me direz-vous, que fait-on ? Aiguise-t-on déjà le sabre du sepuku ? Pas encore. Il reste malgré tout quelques raisons d’espérer.
               1-Il y a des gens qui luttent : pêle-mêle, petits producteurs de terroir, Finance Watch, Confédération paysanne, Colibri, Kokopelli, Criirad, Sherpa, Collectif Roosvelt, LPO,…
               2-Vous pouvez aiguiser votre esprit critique en pratiquant la chasse aux bobards ; je vous propose d’ailleurs des lectures subversives à la dernière page, en nombre limité parce que je ne conseille que ce que j’ai lu et apprécié.
               3-Vous pouvez agir par de petits gestes, en soignant votre bilan carbone –éviter les déplacements inutiles-, en évitant la surconsommation, en privilégiant le commerce de proximité.
               N’attendez pas que les choses se fassent d’elles-mêmes, vous risqueriez d’attendre longtemps. On nous parle d’un monde en transition, d’une nouvelle ère : persuadez-vous bien que ceux qui dévorent le plus gros du gâteau n’autoriseront le début d’une « civilisation environnementale » qu’au moment où ils auront calé leur business pour tirer profit de ce « nouvel âge ». S’il n’était question que d’argent, l’affaire ne serait pas si dramatique, mais les conséquences de l’idéologie dominante pourrait être des désordres majeurs de notre biotope et, à leur suite, la dégringolade sociale, la violence et l’égoïsme démultipliés puisque, la deuxième guerre mondiale l’ayant démontré, dans une situation de grande crise les humains se répartissent en : une fraction d’ignobles que nul sentiment n’arrête, un masse d’impuissants qui essaient de survivre, une frange de résistants qui sacrifient leur vie à leur idéal.
               Je ne parierai pas sur la partie qui serait la mienne ; en tous cas la seule planche de salut c’est qu’un (des) homme(s), issu de la dernière catégorie, prenne les rênes, entraîne la masse dans un mouvement salutaire et limite les entrepreneurs à une activité commerciale aussi nécessaire que raisonnée.
               En l’absence d’une personnalité de cette force,  il ne faut pas attendre de solutions de la bonté et de la sagesse humaines dont l’idée qu’elles sont partagées par tous est un pur fantasme. Je n’en veux pour preuve que ce que j’appelle le syndrome du dodo-Nauru.
               Nauru, appelée aussi l’ile plaisante, c’est 21 km2 de paradis dans le Pacifique sud, jusqu’au jour où l’on découvre puis exploite le phosphate de son sous-sol. L’exploitation commence en 1907 et fait de Nauru un des plus riches pays du monde ;  à partir de 1986 le gisement décline, les cours du phosphate baissent : exploitation sans freins, dépenses somptuaires, la république de Nauru –créée en 1968- dépose le bilan en 2004. Il n’y a plus d’argent, plus de terre arable, quasiment plus d’arbres ; les habitants, presque tous obèses, regardent leur île au 9/10 dévastée, leurs 4x4 et leurs bus qui rouillent, leur banque inutile, leur futur laminé.
               Dans les îles Mascareignes de l’Océan indien vivaient les dodos, ou drontes. Ce bon gros volatile de la taille d’un dindon, pataud, incapable de voler, fut découvert sur l’île Maurice par des marins hollandais en 1598. Il faut admettre qu’un beau dodo rôti à la broche, c’était tentant ! Capture facile, viande abondante, pourquoi se priver ? Malgré tout, qu’auriez-vous fait au moment où il ne restait que quelques couples ; comme les gens du 18ème siècle, les manger jusqu’à la dernière cuisse ? Qu’a pu penser celui qui l’a croquée ? Si vous voulez voir un dodo aujourd’hui il vous reste les livres ou les musées (Londres, Copenhague, Prague).
               Voilà ; pour moi ces deux exemples sont l’illustration absolue de la sagesse humaine. Ne comptons pas sur le bon sens planétaire pour ralentir ce monde, voiture sans freins lancée dans une pente qui, au lieu de rétrograder, ne cesse d’accélérer. Pour ranimer l’économie, cette moribonde, quoi de mieux que les grands travaux : encore plus d’autoroutes, de zones commerciales, de bâtiments divers, d’aéroports ; on arrive à saturation dans pas mal d’endroits ? On verra bien ; dans cinquante ans  on aura trouvé des solutions !
               Comme Guy Debord je verrais bien un retour au sensible, au réel, à la vie quotidienne. Ce qui me sidère c’est l’imperméabilité de l’univers des décideurs ; ils ont construit un monde parallèle régi par leurs propres règles, de plus en plus distant des réalités organiques et physiques ; ils ignorent superbement, depuis quarante ans, les avertissements et les analyses de scientifiques reconnus, de sociologues et de penseurs plus qu’estimables. Dans leur univers une forêt n’est pas une forêt mais un potentiel de loisirs rémunérés, un atout marchand, un gisement de ressources pour construction, chauffage ou papier. Cette vision déformée –et c’est là le problème- prévaut en tous lieux, à tous moments et n’épargne(ra) , à plus ou moins long terme, ni beauté, ni caractère sacré.
               De même toute terre est vue comme un terrain, c'est-à-dire une surface qui s’offre à l’aménagement urbain et non pas comme le tissu vivant de notre planète ; l’eau est un bien rare dont la captation engendre conflits d’intérêts, convoitise, commerce.
               Prenant appui sur l’expansion démographique et les nécessités économiques les décideurs peuvent appliquer –avec quelques légers freins- leur doxa impitoyable : ce qu’ils font à la nature il est logique qu’ils le fassent aux hommes, simples machines humaines à la valeur marchande dérisoire.
               Il n’est pas nécessaire de sortir de Polytechnique pour comprendre que l’équation  monde fini x croissance perpétuelle de l’économie x démographie explosive = crises  à répétition de plus en plus fréquentes et dévastatrices.
               Aussi admirable que soit une tablette tactile, elle ne produit pas le légume qui me nourrit, l’eau qui me désaltère, le bois qui me chauffe, la plante qui me soigne, les pierres qui m’abritent. Si, pour profiter d’un smartphone je dois renoncer pour toujours à trouver une eau potable, mon choix est vite fait.
               Pourquoi changer, me direz-vous ? Parce qu’à moins de croire à la petite souris sous l’oreiller et au marchand de sable, les désordres peuvent avoir raison de notre « civilisation » [regardez les états de barbarie dans des villes sud-américaines, par exemple], la Terre ne grandira pas pour nous faire plus de place, les déchets toxiques n’auront pas la courtoisie de s’évanouir dans la nature et, ayant exploité les gisements faciles, nous devrons bousiller encore plus la planète pour utiliser les moins accessibles. Parce que j’ai envie que mes arrière petits-enfants voient en moi un humain sympathique et non un de ces « connards » qui leur ont laissé des factures à régler pour des biens dont ils ne peuvent plus profiter.
               Si vous n’êtes pas d’accord, continuez, mais soyez prêts à assumer ce que vous vivrez et ce que vous lèguerez à vos descendants : un monde artificialisé où les idées de nature proche, de charme des paysages familiers,  seront de plus en plus virtuelles pour les citadins, puisqu’il faudra, pour les besoins humains et le maintien des emplois, multiplier bâtiments, routes, autoroutes, parkings,… Vous avez entendu comme moi que la Chine (où l’on se promène avec un masque dans les grandes villes) urbanise l’équivalent de l’lle-de-France tous les cinq ans (les Chinois : de futurs visiteurs si nous préservons nos vertes campagnes).
               Ce sera également un endroit où feront rage les guerres sans visage pour l’accès aux ressources (eau, terre, minerai,…) ; un lieu aux aménagements inhumains, une sorte de jungle urbaine où nos germes héréditaires trouveront un milieu accueillant (paranoïa, délinquance et sadisme, exploitation des autres, tyrannie législative et réglementaire).
               Messieurs, en route pour Cythère, mais ne vous rassurez pas en vous disant que je délire, examinez les chiffres, relisez historiens, ethnologues et poètes, et vous m’en direz des nouvelles.

P.S. : Demain, deux annexes et la liste des lectures subversives.

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